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الأربعاء، 23 ديسمبر 2009

Feuerbach

Parce qu'elle est une des sources de la pensée marxiste, la philosophie de Feuerbach a été occultée par celle de son illustre disciple. Il convient de restituer l'originalité de cette pensée qui veut donner à la philosophie un nouveau départ après le parachèvement de l'ancienne philosophie réalisé par Hegel.

Sommaire

Les sources de sa pensée.
La vie de Feuerbach
Apport conceptuel.
  • La critique de Hegel
  • Sensualisme et altruisme
  • La critique de la religion
Principales œuvres.

Les sources de sa pensée.

La pensée de Feuerbach part d'abord d'une réflexion sur la philosophie de Hegel dont il fut l'auditeur attentif à l'Université de Berlin de 1824 à 1826. La théologie chrétienne, le sentiment religieux (sa critique) traversent l'ensemble de sa pensée. Enfin, Feuerbach réfléchit (durant la troisième période de son œuvre) sur la nature et les sciences naturelles.

La vie de Feuerbach

Il naît le 28 juillet 1804 à Landshut (Bavière). Son père, juriste renommé, venait alors d'être nommé professeur à l'Université de cette ville. Il suit des études secondaires au lycée de Landshut et décide de se consacrer à la théologie protestante. En 1823, il écoute à l'Université d'Heidelberg les leçons de Daub et de Paulus. Si ce dernier le déçoit, en revanche le premier lui fait entrevoir une conciliation possible de la philosophie et de la religion.
En 1824 il se rend à Berlin où enseigne Hegel dont il suit les cours jusqu'en 1826. Il décide alors de renoncer à la théologie au profit de la philosophie. Il termine ses études à Berlin par une dissertation intitulée De ratione una, universali, infinita qu'il envoie à Hegel accompagnée d'une lettre où il se déclare son disciple. Celui-ci ne répond pas.
À la suite de la publication de sa dissertation (1828), il est nommé privat-dozent à l'Université d'Erlangen où il enseigne de 1829 à 1832. En 1830 paraît son essai, Pensées sur la mort et sur l'immortalité. Il y affirme que la Raison seule est immortelle et conclut qu'il faut nier l'immortalité personnelle, revendiquant ainsi l'athéisme. Le livre est publié anonymement mais très rapidement ses collègues d'Erlangen devinent qui en est l'auteur. L'indignation du corps professoral lui interdira toute chaire universitaire.
En 1836, il épouse Bertha Loöw, cohéritière du château de Bruckberg (où le couple s'installe) et d'une manufacture de porcelaine (dont il profite des bénéfices). Feuerbach mène une vie de gentilhomme campagnard au bonheur simple.
Il rallie le groupe des hégéliens de gauche (ou jeunes hégéliens). Ennemis du passé et de l'État, ceux-ci luttent au nom d'idéaux contre l'ordre établi. Dans leur revue, les Annales de Halle, Feuerbach publie, en 1839, sa Contribution à la critique de la philosophie hégélienne où il dénonce le caractère factice et erroné de l'unité de la pensée et de l'être dans l'optique idéaliste de Hegel.
Feuerbach revient à des préoccupations religieuses dont naîtra, en 1841, son ouvrage fondamental, L'essence du christianisme. Le livre connaît un grand succès (il sera réédité deux fois, en 1842 et en 1848). Il s'agit de révéler les mystères de la religion afin que l'homme puisse se connaître lui-même. L'essence du christianisme est l'essence de l'homme. L'anthropologie lui inspire deux essais : les Thèses provisoires en vue de la réforme de la philosophie (1842) et les Principes de la philosophie de l'avenir (1843).
En 1845, avec Essai sur la religion, Feuerbach abandonne l'humanisme et s'oriente vers un naturalisme de plus en plus appauvri. Cette orientation est précipitée par la polémique soutenue contre Max Stirner. Dieu n'est plus le reflet des perfections humaines mais celui de la nature toute entière.
La révolution de 1848 semble consacrer le triomphe des idées politiques et sociales de la gauche hégélienne. Mais Feuerbach reste à l'écart de l'activité politique. Il accepte néanmoins, à la demande des étudiants de Heidelberg, de faire un cours sur la philosophie de la religion. Il y expose les principes qui l'avaient guidé dans la rédaction de L'essence de la religion. Il a, entre autres, un auditeur attentif : Gottfried Keller.
De retour à Bruckberg, Feuerbach subit de plus en plus l'emprise d'une nature divinisée. Il publie, en 1850, La Révolution et les sciences naturelles où il affirme que le corps est à la base de la pensée et même que "La nourriture de l'homme est la base de la culture et de l'état d'esprit de l'homme (…) L'homme est ce qu'il mange".
En 1857 est publié son dernier grand ouvrage, La théogonie d'après les sources de l'Antiquité classique hébraïque et chrétienne. Il essaye d'y concilier l'humanisme de L'essence du christianisme et le naturalisme de L'essence de la religion. Il cherche à retrouver dans la notion de Dieu les éléments humains et naturels. L'homme, se heurtant à la toute puissance de la nature, transfère aux Dieux son désir de vaincre. " Ce que l'homme n'est pas réellement, mais ce qu'il désire être, il en fait son Dieu, ou cela est son Dieu. " Ce dernier ouvrage n'a aucun succès.
La manufacture de porcelaine fait faillite et, contraint de quitter Bruckberg, Feuerbach s'installe en 1860 dans une maison de campagne à Rechenberg, près de Nuremberg. Les dernières années sont assombries par des soucis d'argent. Ses forces physiques et intellectuelles déclinent. Il meurt le 15 septembre 1872. Des milliers d'ouvriers (en grande partie militants du parti social-démocrate auquel Feuerbach avait adhéré) l'accompagnent à sa dernière demeure, au cimetière Saint Jean de Nuremberg. En 1931 un monument est élevé à Nuremberg " en souvenir du philosophe du matérialisme philosophique ", monument où étaient inscrites ces deux phrases : " Fais le Bien pour l'amour de l'homme" et " L'homme créa Dieu à son image " . Il fut démoli deux ans plus tard par l'Allemagne nazie.

Apport conceptuel.

1) La critique de Hegel
Feuerbach est lié à la fin de la philosophie classique allemande et précipite toutes les critiques de la philosophie hégélienne. L'originalité de sa pensée réside donc d'abord dans son opposition à Hegel. Ce dernier ayant achevé l'histoire de la philosophie, seul celui "qui a le courage d'être absolument négatif a la force de créer du neuf".
L'hégélianisme présente d'abord une contradiction : alors même que sa méthode dialectique défend l'idée que doivent naître des dépassements toujours nouveaux, la doctrine hégélienne prétend mettre un terme à cette histoire en l'arrêtant dans un système considéré comme le terme suprême de la pensée humaine. De plus, en identifiant le réel au rationnel, la pensée hégélienne semble justifier l'ordre existant mais, en exigeant que le rationnel se retrouve dans le réel, elle semble aussi préconiser une action politique réformatrice.
Selon Hegel, l'Esprit s'aliène dans la nature afin d'y prendre conscience de lui-même. La nature est donc inférieure à l'Esprit. Feuerbach, reprenant ce décalage entre l'esprit et la nature, démontre que la dialectique hégélienne est incapable d'embrasser la totalité du monde réel car, si elle reconnaît la succession temporelle, elle ignore en revanche l'espace.
Feuerbach reproche aussi à Hegel d'avoir posé l'être comme un concept sans présupposition alors qu'il s'agit en réalité d'une abstraction : ce n'est pas le néant qu'il faut opposer à l'être pur mais l'être concret et sensible. Hegel, comme toute la philosophie depuis Descartes, en rompant avec la perception sensible, a coupé l'homme de son expérience et ne pénètre jamais dans le monde concret. Puisque nature et esprit s'opposent, la philosophie ne doit pas prendre pour point de départ l'esprit mais la nature qui permet d'éclairer les démarches de l'esprit. Le mépris de la nature est un héritage de la théologie chrétienne et Hegel est en réalité un théologien travesti en philosophe : Hegel considère que la réalité est posée par l'idée comme la théologie considère que la nature est créée par Dieu.
Il s'agit de réinterpréter les notions d'être et de penser : l'être doit être affranchi du logos pour qu'il perde son caractère abstrait et se charge de la richesse d'exister. Le penser, obligé de tenir compte désormais d'un être enrichi de tout ce que lui apportent les sens, se hausse au niveau du connaître. Les sens donnent accès aux vérités philosophiques.
2) Sensualisme et altruisme.
L'homme se représente les objets avant de les saisir et va donc de l'apparence à la réalité. De la même façon, historiquement, les hommes se sont d'abord intéressés au divin avant de parvenir à saisir les choses comme elles sont c'est-à-dire avant tout humaines.
Les trois degrés du sensualisme feuerbachien sont les suivants :

  • La perception : immédiate et directe, elle est, certes, fondamentale mais reste cependant superficielle. Elle nous permet d'entrer en communication seulement avec l'extérieur des êtres.
  • La sensation : elle nous unit à l'intérieur des êtres.
  • L'amour : il donne à la sensation son degré de perfection le plus haut. Quand j'aime, mon amour prouve l'être, l'existence d'objets hors de notre conscience. Inversement la souffrance a lieu lorsque ce qui existe dans mon imagination n'existe pas en réalité. La douleur prouve donc la non-existence de l'être. " Ce dont l'existence te procure de la joie, et ce dont la non-existence te procure de la douleur, cela seul est. " Les sentiments humains ont donc une portée ontologique et métaphysique.

L'amour assure la transition vers l'altruisme, en particulier l'amour sexuel. Le moi véritable, en effet, n'est pas asexué. La philosophie doit tenir compte de la différence sexuelle. Ainsi se savoir homme, c'est reconnaître l'existence d'un autre être (la femme) qui est différent mais en même temps complémentaire.
Le véritable principe de l'être (et donc du penser) est l'union du Je et du Tu. L'existence d'autrui est indispensable à la connaissance. La réalité du Toi prouve celle du Moi. C'est parce que Je et Tu agissent l'un sur l'autre qu'ils constatent qu'ils sont à la fois sujet (Moi) et objet (non Moi). Parce que je prends conscience qu'il existe d'autres hommes hors de moi, j'acquiers en même temps la certitude qu'il y a d'autres objets hors de moi. Du reste, pour connaître il faut sans cesse recourir à l'autre. C'est parce que les autres confirment ce que je pense que je puis affirmer posséder une vérité. "Je doute de ce que je vois seul, je suis sûr de ce que l'autre voit aussi"
3) La critique de la religion.
À la différence des animaux, l'homme a une vie intérieure et a conscience de faire partie d'une espèce. L'homme, pour Feuerbach, se définit par la raison (qui permet la pensée), la volonté (permettant l'action) et l'amour (fondement de la vie en commun). " L'homme existe pour connaître, pour aimer, pour vouloir " Mais l'homme se rend compte du caractère fini de ces prédicats en les comparant à ceux de son espèce et comprend qu'il est incapable de réaliser par ses propres moyens le vrai, le bien et l'amour. Il va donc projeter ces attributs humains hors de lui et les transférer à un être supérieur qu'il appelle Dieu. L'homme découvre donc, grâce à la religion, sa propre essence mais séparée de lui puisqu'il la confie à un être hors de lui-même. L'homme a, au fond, créé Dieu à son image ou plutôt à l'image de son espèce puisque les attributs divins sont infinis et qu'ils sont finis dans l'individu. Ce mécanisme est exactement ce qu'on appelle un processus d'aliénation c'est à dire de perte de soi dans un autre, cet autre ici étant Dieu. Il s'agit bien d'une perte de soi : la raison humaine s'efface devant l'illusion religieuse (pourquoi partir à la conquête du bonheur terrestre et donc du progrès quand seule compte la providence divine ?), la volonté abandonnée entre les mains de Dieu entraîne une soumission aveugle et l'homme, asservi par l'amour divin, met toutes ses forces au service d'une foi aveugle qui dresse les individus les uns contre les autres. La religion fait donc obstacle au progrès. L'homme se perd d'abord en Dieu.
Mais la conscience humaine s'éveille et l'homme va chercher à récupérer les valeurs qu'il a données à Dieu. L'homme se réapproprie son essence en comprenant que le rapport entre l'homme et Dieu n'est rien d'autre qu'une projection du rapport qui existe entre l'individu et l'espèce humaine. Chacun comprend qu'il doit réaliser à son niveau les buts communs de l'espèce toute entière. C'est l'homme générique c'est à dire l'espèce humaine toute entière qui est en réalité un Dieu pour l'homme. L'homme est donc fin en soi.
Il ne s'agit pas chez Feuerbach (contrairement par exemple à Nietzsche) de détruire les valeurs religieuses. L'athéisme conserve les valeurs traditionnelles mais leur enlève toute caution divine. Enlever Dieu n'est donc pas enlever à l'homme les obligations qui sont les siennes mais, au contraire, donner à l'homme la pleine responsabilité de son destin. Les valeurs traditionnelles sont simplement laïcisées. Elles en deviennent même plus fortes car elles ne sont plus imposées de l'extérieur mais sont inhérentes à l'homme.
Il faut bien voir que, pour Feuerbach, la religion a une nécessité historique. Elle est la première étape nécessaire pour qu'ensuite l'homme prenne conscience de son essence.

Les principales œuvres.

L'œuvre se divise en trois périodes :

  1. La période hégélienne :
    • Pensées sur la mort et sur l'immortalité (1830)
    • Histoire de la philosophie moderne depuis Bacon de Vérulan jusqu'à Benoît Spinoza (1833)
    • Critique de l'Anti Hegel (1835)
    • Pierre Bayle, une contribution à l'histoire de la philosophie et de l'humanité (1838)
  2. La période humaniste :
    • Contribution à la critique de la philosophie de Hegel (1839)
    • L'essence du christianisme (1841)
    • Thèses provisoires en vue de la réforme de la philosophie (1842)
    • Principes de la philosophie de l'avenir (1843)
  3. La période matérialiste :
    • L'essence de la religion (1845)
    • Contre le dualisme du corps et de l'âme, de la chair et de l'esprit (1846)
    • La révolution et les sciences naturelles (1850)
    • La Théogonie (1857)

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